
La modification du SRADDET
En préalable : je souhaite dire à quel point il est nécessaire d’épargner la capacité nourricière – et tout simplement la vie – des terres en Bretagne. Pour mémoire, un rapport de la DREAL publié il y a un an nous rappelle que sur la période 2011-2020, la Bretagne arrive en tête des régions françaises pour ce qui concerne la proportion de consommation de foncier pour l’habitat, et en 4e position pour ce qui concerne le foncier économique.
Alors à ceux qui, au nom d’une conception étrange de l’identité française, s’élèvent contre ce qu’on appelle « le renouvellement urbain », le fait de réhabiliter des logements existants plutôt que d’en construire de nouveaux, il s’agit en effet de rappeler que la densité EST le modèle des bourgs bretons, et que la construction, depuis les années 60, de lotissements, ronds-points et zones d’activités suivant un modèle d’étalement urbain, correspond à une forme d’américanisation du paysage breton.
Et donc le groupe BAG est pleinement favorable à l’esprit de la loi Climat et Résilience, tout comme à la loi ZAN 2 de juillet dernier – je dis bien l’esprit car les modalités de sa mise en œuvre, comme souvent dans ce pays, laissent vraiment à désirer.
Mais au moins nous avons désormais un décret qui précise – enfin – la notion d’artificialisation. Ce qui, au passage, n’est pas sans conséquences pour les maraichers serristes du pays nantais et du Finistère nord….
Tout ceci étant dit, j’en viens à la première modification du SRADDET qui nous occupe aujourd’hui.
Je ne reviendrai pas sur l’ensemble des dimensions concernées. Nos positions n’ont pas changé depuis les derniers débats sur le sujet. Pour ce qui concerne l’aéroportuaire, nous continuons de penser que deux aéroports comptent à l’échelle de la Bretagne : celui de Nantes à l’Est et celui de Brest à l’ouest, et donc que la priorité de la Région Bretagne dans son périmètre actuel, c’est l’aéroport de Brest.
Et je voudrais surtout saisir l’occasion de la modification concernant la Conférence Régional de Gouvernance du ZAN, dont nous comprenons qu’elle se traduira en Bretagne par un prolongement de la Conférence régionale des SCOT, pour dire quelques mots des incohérences qui se manifestent dans les listes des Projets d’Envergure Nationale et Européenne mise sur la table par l’Etat, et notamment dans la première de ces 2 listes, celle qui concerne les projets qui sont appelés à être réalisés d’ici 2031.
– Le 1er problème concerne justement cette date de 2031. Alors que la Bretagne a joué le jeu de ne faire remonter que des projets aptes à être réalisés à cette échéance, cette première liste comporte un certain nombre de dossiers dont nous pouvons douter qu’ils soient réalisables à cet horizon temporel. Et je ne ferai pas de commentaire sur l’aéroport de Nantes Atlantique. Première iniquité
– 2e : autant nous pouvons saluer la priorité donnée par l’Etat aux enjeux de transition énergétique, autant nous relevons nombre d’incohérence dans la façon dont cet objectif est décliné dans le choix des projets. Cette question concerne le port de Brest – excusez-moi je parle beaucoup de Brest aujourd’hui – qui ne peut certes pas prétendre à une extension puisque la géographie le contraint dans son enveloppe foncière actuelle, mais qui a misé sur le développement des énergies renouvelables et qui pourrait avoir intérêt à développer l’énergie éolienne à partir d’une plateforme rétro-portuaire, parce qu’il n’entre pas dans la catégorie juridique de Grand Port Maritime, contrairement à l’autre grand port breton qu’est celui de Nantes-Saint Nazaire. 2e iniquité
– 3e : nous avons de sérieuses questions sur la circulaire Béchu, qui prévoit une conférence de conciliation et une souplesse de 20% dans l’application du ZAN. Le Ministre aurait prôné cette souplesse auprès des préfets pour guider leurs échanges avec les territoires. Cette méthode est inacceptable !
– 4e : nous avons encore des doutes, de nature méthodologique également, sur la façon dont nous passerons d’une comptabilité de la consommation foncière effective à une mesure de la trajectoire vers le zéro net
– Ensuite une question, pour vous Madame la Vice-Présidente : qu’allez-vous plaider en matière définition de l’intérêt national ? Est-il possible de demander que des projets industriels qui n’existeraient pas encore aujourd’hui, et qui sont compatibles avec la transition écologique – nous avons parlé par exemple de la structuration d’une filière lin et chanvre en Bretagne – puisse trouver leur place dans ces listes.
– Enfin, et peut-être surtout, nous aurions pu comprendre que l’Etat décide de n’attribuer que 30 hectares à la Bretagne, qui est une région dynamique, au nom d’un volontarisme en matière d’aménagement du territoire et d’une politique de rééquilibrage au profit de régions moins dynamiques. Mais quand on regarde la nature des projets auxquels sont attribués des centaines d’hectares, comme les 600 hectares attribués au site d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure, on peut douter que cela soit de nature à relancer la dynamique économique et le peuplement des Hauts de France…
Et donc pour conclure, si nous sommes bien entendu favorables à ce que la Bretagne assume sa part de l’effort de solidarité nationale, nous rejetons la liste des Projets d’Envergure Nationale et Européenne proposée par l’Etat, qui s’apparente à un geste d’iniquité et à un grand renoncement en matière d’aménagement du territoire national.